Le Jeudi 11 Janvier 2018, ont eu lieu au sein de la Collégiale Ste CROIX à MONTELIMAR, les obsèques du Major Boubekeur BEN DADA.
Etaient présents à cette cérémonie, notre Président, le Général Alain ROCHE, accompagné du Président Honoraire, le Commissaire Général Alain GILBERT, les vice-Présidents, le Médecin Général Louis BIARD et le Dr André ALLAND.
Etaient également présents le lieutenant Jean Claude BERNARD, le Colonel Pascal FUFOURT et le lieutenant Claude. GORCE.
Mr Jean Claude LAUNAY était notre Porte Drapeau.
C'est le Colonel Gérard THIBLET qui a prononcé l'éloge funèbre, et vous en trouverez ci-dessous la teneur.
Merci de tout cœur de votre présence pour votre soutien chaleureux à un moment où deux familles perdent un être cher. La sienne, celle de Boubekeur, et celle des militaires, ses frères d'armes, qu'ils soient en activité, en retraite, et anciens entre autres de son régiment de cœur, le 45° de Montélimar.
La nuit est tombée sur tes 83 printemps, tu as rejoint ton paradis blanc, ton « Lesotho », comme disent les africains du sud, le royaume dans ton ciel. Elle a éteint ton regard, un regard qui frappe pour convaincre, volontaire, audacieux, c'est ton image qui ne peut laisser indifférent. Mais aussi un regard doux, rassurant, complice et bourré d'empathie.
Il manque désormais à tes proches, à tes amis, à celles et ceux que tu as éduqué, à la vie, dans bien des domaines, et pas que militaires.
C'est pourquoi, un hiver de novembre 1953, tu n'avais pas 18 ans, tu as choisi le métier des armes, volontairement, pour servir dans ton Afrique du Nord natale, dans l'Arme des Transmissions.
Et l'aventure commence de la Tunisie à l'Algérie, de djebels en oueds où il est noté dans ton errance, ta participation à de nombreuses opérations de guerre en portant à bout de bras nos trois couleurs, et où tu te distingues d'emblée, je cite : "par ton allant, ton esprit d'initiative, ta compétence, ton courage et ton mépris du danger". Tu devais sentir le sable chaud ; et pas que le sable chaud. Cet excellence s'inscrit sur ta barrette d'ancien combattant AFN en 1960, à 7 ans de service seulement, où sont rivetés 4 clous dans notre jargon, quatre étoiles, trois de bronze et une d'argent gagnées malgré tes blessures et grâce à ton sang-froid, qui a aussi sauvé la vie de tes hommes pris souvent au piège des combats et du feu.
Aussi, plus tard à 34 ans, tu obtiens un titre de reconnaissance du gouvernement pour services rendus à la nation pour comportement exemplaire au feu. Parce que tu avais obtenu de tes soldats une adhésion indéfectible qui n'avait d'égale que l'admiration étonnée de tes supérieurs. Tu étais devenu un homme de guerre pour ta France tant aimée, mais ton humilité et ton côté très pudique ne feront qu'ajouter à tes mérites.
Rapatrié en métropole, tu enseigneras dans diverses écoles de formation militaire et tu serviras dans de grandes unités. Tu raccroches les gants pour terminer ta carrière au 45° de ton cœur. Et tu t'engageras dans le monde sportif local entre autres, pour encadrer bénévolement les enfants du bled, du pays, nous disais-tu.
C'est alors, qu'en pleine force de l'âge, re-blessure, héliportage opérationnel d'urgence, opération chirurgicale délicate, dont il ressort tétraplégique. Son tempérament durant de longs mois de rééducation plus tard, lui dit : Ben, lève-toi et marche, et, il marche, handicapé certes, mais il est debout, il combat de nouveau, quelle trempe !
Alors, je vais vous le faire à la MALRAUX, André Malraux :
Jeunesse, présente aujourd'hui, écoute bien ce curriculum vitae militaire, ce parcours, et surtout souviens-toi :
Croix du combattant volontaire avec barrette AFN à 25 ans
Médaillé Militaire pour services exceptionnels à 27 ans, dont il est aussi titulaire du cinquantenaire d'appartenance, méritée vu son âge.
Croix de la valeur militaire avec 4 citations toujours à 27 ans.
Et pour couronner ce dévouement sur sa poitrine:
Après avoir été fait d'abord chevalier,
Officier de l'ordre national du mérite, la bleue,
Officier de la Légion d'Honneur, la rouge, dont le Général Roche, Président de Comité, ici présent va vous entretenir,
C'est assez rare pour passer inaperçu, mais ce genre d'homme, chrétien de cœur de surcroît, n'a jamais mis ses faits de guerre en avant pour être écouté et respecté. Chez ces gens-là, on n'en parle pas, a chanté Jacques Brel.
Et regardez bien, jeunes gens, nos soldats en opération extérieure qui ont votre âge, portent avec fierté sur leurs bras gauche cet écusson bleu blanc rouge brodé France. Ayons une pensée pour eux et si le Major Bendada avait 60 ans de moins, il en serait encore, parmi eux.
Alors ce matin, dans un cauchemar dû à ma peine, j'ai vu Ben, une larme coulait sur sa joue, et je pose ma main sur mon cœur et faites comme moi aujourd'hui, et pensez : je suis Bendada.
Respect et salut Ben !
Notre Président, le Général Alain ROCHE a ensuite rappelé les valeurs de la Légion d'Honneur et vous trouverez son texte ci-dessous.
Madame, votre époux, le major Boubeker BEN DADA était Officier de la Légion d'Honneur. La Légion d'Honneur, cette décoration prestigieuse, créée et conçue, en 1802, par le Premier Consul Napoléon BONAPARTE, est marquée par l'Histoire et la Morale. Le mot Honneur résonne comme la cristallisation de la dignité et des valeurs les plus nobles.
Cette récompense de la Nation est représentative du Peuple de France. Elle n'est pas réservée aux seuls militaires et distingue aussi le monde civil. Bonaparte disait « les soldats les plus humbles seront fiers de porter cette décoration au même titre que les savants les plus illustres ». Ou encore, cette décoration a pour vocation de « réunir le courage des militaires aux talents des civils »
Les Légionnaires ont donc toutes et tous des parcours différents. Mais au-delà de leur diversité, ils incarnent tous les mêmes idéaux, les mêmes valeurs, à savoir : la solidarité, l'honneur, le courage, la volonté de faire bouger les choses et, par-dessus tout, l'engagement.
Le major Boubeker BEN DADA a servi la France avec dévouement au péril de sa vie. Comme tous les légionnaires, il n'a jamais renoncé à ses idéaux. Il a su s'appuyer sur sa force de caractère et sa volonté pour construire avec d'autres un monde meilleur. Dans ses combats en Algérie, il n'a jamais renoncé, jamais abdiqué. Il est resté fidèle en permanence à ses engagements, à l'honneur. L'Honneur est un don de soi. Il n'est pas raisonné, il est intrinsèque à l'homme. Il développe un principe moral de conduite et d'action aux travers des plus belles qualités humaines : probité, courage, vertu, dignité, intégrité, respect de soi et respect des autres. Avoir le sens de l'honneur revient à s'élèver au dessus des écueils de la vie et des dérives de l'humanité. L'homme, n'est pas parfait. Mais il doit avoir le réflexe de revenir sur le chemin de l'honneur chaque fois qu'il s'en écarte.
Ce sens de l'honneur a guidé le major BEN DADA dans son engagement au service de la France. Il a su faire siens les mots « Honneur et Patrie » qui sont la devise du premier Ordre national. Peut-il y avoir un plus bel héritage que cette devise associée à celle de notre Nation « Liberté, Egalité, Fraternité ». Cinq mots, qui s'ils étaient toujours respectés, gommeraient toutes les aspérités des hommes. N'écoutez pas les sirènes de ceux qui prennent plaisir à dénigrer la Légion d'Honneur et les légionnaires suite à des nominations par eux jugées injustifiées. Ce serait faire fi des services éminents rendus à notre Nation par des femmes et des hommes tels que le major BEN DADA.
La Légion d'Honneur constitue l'un des remparts républicains sur lequel viennent se briser les tempêtes de l'égoïsme, de l'inégalité et de l'injustice. En 218 années, elle a connu deux empereurs, trois rois, quatre Républiques, 26 Présidents. Son existence a parfois été mise en péril en particulier en 1848 et en 1870. Mais son prestige et sa force lui ont permis de surmonter chacune des épreuves que notre Patrie a subies.
La Légion d'Honneur est beaucoup plus qu'une décoration. Certes, elle est une marque de reconnaissance envers celles et ceux qui se sont dévoués pour leur pays. Mais elle est aussi un porteur de mémoire et de valeurs pour les générations qui nous succéderont. Elle est l'essence même de notre pays, de notre Patrie. C'est pour cela que les hommes et les femmes décorés de la Légion d'Honneur doivent toujours garder à l'esprit, le mot de Maurice DRUON, Grand-Croix de la Légion d'honneur, « Porter cette Croix rend fier, assurément, mais modeste aussi, quand on songe aux héros et aux génies sur lesquels elle a brillé ».
Madame BEN DADA et toute votre famille, nous tous réunis cet après-midi, soyons fiers et reconnaissants de ce qu'a réalisé le major BEN DADA.
Major Boubeker BEN DADA, vous étiez un de ses héros évoqués par Maurice DRUON. Vous étiez un grand soldat.
Au revoir major, au revoir mon frère d'armes.
Voici quelques photos souvenirs de cette cérémonie.